2017 — ATELIER CINEMA – LES LUMIÈRES DE LA VILLE

Ce projet est d’écrire et réaliser un court-métrage muet en une journée, avec des jeunes contactés par l’association 100 pour 1 et six spectateurs tirés au sort suite à un appel à casting.

  • Dates: Septembre-Octobre-Décembre 2017
  • Séances : 3 séances
  • Durée de l’atelier : 1 journée par court-métrage, 3 au total
  • Lieux : Cinéma Utopia (Avignon)
  • Intervenant(s) artistique(s) : Christophe Lebon
  • Public : 12 adultes – 6 spectateurs et 6 réfugiés

Ce projet a été porté par l’association 100 pour 1, Ateliers du court-métrage, le Collectif Inouï, Cinambule et Utopia.

Paroles de Christophe Lebon

Retour d’expérience en tant que coach et initiateur du projet en collaboration avec Utopia

«Nous avons réalisé trois ateliers qui ont donné naissance à 3 films.

Ces ateliers se sont tous déroulés dans un cadre très précis, et un format de création très cadré afin de pouvoir produire un film de 4 minutes en une journée. (environ 15 minutes d’images)

Le parti pris a été pour chacun des films, le format ” cinéma des années 20 ” ou cinéma-muet ou encore film burlesque.

  • 2 heures dédiées à l’écriture en s’appuyant sur 5/6 personnages, une dizaine d’accessoires et la contrainte de s’exprimer essentiellement par l’image soutenue par quelques cartons.
  • 1 heure dédiée à la préparation du tournage, découpage, mise au propre des idées, habillage des comédiens, formation technique des techniciens.
  • 3 heures dédiées aux prises de vue sur un mode inspiré directement des tournages professionnels (1 réalisateur, un cadreur, 1 script, 1 clap, régisseurs etc.)
  • Le montage est réalisé quelques jours plus tard à 2, pour ensuite être soumis à l’équipe d’Utopia avant sa mise en ligne.

Cet atelier dont le but est de provoquer la rencontre entre un public de spectateurs d’âges et de sexes différents avec un public de jeunes migrants rempli à mon sens son objectif.

Simplement parce que des liens se sont créés pendant le tournage, liens qui perdurent encore aujourd’hui. Certains actes de solidarités ont même été entrepris, le collectif échange régulièrement des messages, certains se voient, certains même ont été hébergés chez des spectateurs participants aux ateliers. Certains le sont encore.

D’un point de vue création je peux dire que les thèmes abordés concernent la plupart du temps la culture des jeunes, originaires d’Afrique noire, dont l’éducation est assez encadrées par la religion. Mais également par leur vécu de migrant.

Le premier film parle de l’interdiction de boire de l’alcool, le second du désir de reconnaissance et le 3ème d’expulsion.
Tous les films ont une fin heureuse dans laquelle la victime est souvent vengée ou tout du moins préservée. (il faut préciser que la partie écriture est conduite selon une règle de dramaturgie classique et de respect du sens de ce qu’on veut raconter par les images, les personnages, les accessoires)

Le format ” cinéma burlesque ” permet d’évoquer les thèmes au travers d’histoires aux situations parfois assez drôles (un moine est surpris en plein baiser avec une entraineuse, un homme cambriole une voleuse puis perd son butin qui est retrouvé par un chien, un autre, sans vergogne, expulse un locataire en plein hiver et se fait attraper par la police pour le vol d’un sac à main qu’il n’a pas volé.

Je pense au final que cette expérience de cinéma offre un support de jeu qui permet de prendre de la distance avec des situations humaines parfois injustes voire violentes.

Je pense que la réflexion que nous avons tous eu au départ sur la création du film permet de nous éloigner de la question d’actualité qui brule les langues : pourquoi l’accueil de ces gens poussés hors de chez eux par la guerre et la misère est il si difficile à pratiquer ?

Est ce que cette initiative que nous avons tous ensemble, de faire un film, de pratiquer l’art cinématographique en toute simplicité n’est pas un moyen d’apaiser aussi nos inquiétudes et notre culpabilité d’habitants de pays ” riche ” ?

Réfléchir tous ensemble à ce que pourrait être une histoire, pas forcément une histoire d’amour qui finit bien, mais un drame, parfois cruel qui a malgré tout l’ambition de faire sourire. Est ce que de cette façon nous apaisons nos angoisses en jouant avec le drame.

Nous nous retrouvons tous, migrants d’Afrique et habitant d’Europe autour d’un projet qui doit prendre la forme d’un vrai film au terme de la journée. Le concret du projet donne aussi beaucoup de sens à notre démarche à tous. Son aspect immédiat, spontané et à la fois très soutenant a permis d’ouvrir le dialogue rapidement et de choisir les rôles de tous facilement. Parfois même avec beaucoup d’envie sur les rôles de comédiens.

L’absence de dialogue force le jeu par le corps et à ce jeu-là, les africains ont une longueur d’avance sur les européens !

Les premiers vrais retours de spectateurs ont eu lieu à l’issue de la projection du premier film, en ouverture d’un ciné-concert donné le 31 décembre à Utopia Manutention. Le film a été mis en musique par l’orchestre qui était présent et dont les interprétations sont souvent singulières car extrêmement ambitieuses: le Collectif Inouï.

Ces retours m’ont surpris tant ils semblaient sincèrement enthousiastes à la fois sur la présence des comédiens mais également sur le résultat dans son ensemble.

Cela m’a donné le sentiment que notre projet avait une vrai légitimité puisque le travail accompli pouvait être apprécié par des gens qui n’avaient pas suivi notre démarche depuis le début.

Nous allons donc poursuivre en essayant de conserver les bases précieuses qui ont fait la réussite de la rencontre mais en allant malgré tout rechercher une nouvelle forme de cinéma qui pourrait avoir davantage d’ambition artistique et par conséquent de portée médiatique.

Etant entendu que notre initiative à tous doit servir avant tout la cause de ceux qui sont en difficulté sur cette période de vie.”