2016 — ATELIER CINEMA ET MYTHOLOGIE GRECQUE – MOI, COLLEGIEN CE HEROS

Au collège Anatole France, des artistes vidéo « en herbe » se racontent en se réappropriant la figure du héros de la mythologie grecque et plus particulièrement l’épisode bien connu de Thésée et le Minotaure.

  • Dates de l’atelier : De septembre 2015 à juin 2016
  • Durée de l’atelier : 48 heures d’intervention, 2 jours de tournage et 5 de montage
  • Nombre de séances : 24 séances de 2 heures et 7 journées complètes
  • Lieux : Collège Anatole France (Marseille)
  • Intervenant(s) artistique(s) : Axelle Schatz
  • Public : 35 élèves de classe relais

Ce projet a été mené avec complicité de Laure Prieur, enseignante spécialisée et la participation d’une documentaliste, une
enseignante en arts plastiques et une enseignante d’éducation physique.

Dans le cadre de l’appel à projets expérimental Éducation artistique et culturelle dans les collèges lancé par le Conseil Départemental des Bouches-du-Rhône, et soutenu par la MGEN et le Collège Anatole France.

Ce sont les élèves de classe relais, des jeunes en grande rupture scolaire qui durant 7 semaines sont intégrés dans un dispositif « particulier », dans
un collège qui n’est pas forcément le leur. Une « parenthèse » à la scolarité classique, durant laquelle ces élèves peuvent bénéficier d’une pédagogie
différente et adaptée à chacun.

Cette expérience cinématographique menée par l’intervenante Axelle Schatz en étroite collaboration avec l’enseignante spécialisée Laure Prieur
durant plus d’un an, a permis aux adolescents de se mettre dans la peau d’un héros poursuivant sa propre quête et surmontant des épreuves toute
personnelles.

Synopsis du film réalisé

Par bien des aspects, le quotidien de certains collégiens d’aujourd’hui ressemblent aux aventures des héros grecs d’autrefois : épreuves,
incertitudes, labyrinthe… Un dédale au travers duquel les jeunes, s’inquiètent, réfléchissent, grandissent et affrontent la vie au collège comme
Thésée affronta le Minotaure.

Restitution et valorisation
– Projection du travail en cours (film non finalisé) au cinéma l’Alhambra, dans le cadre de la journée festival du projet Toute la lumière sur les SEGPA,
devant 180 élèves de SEGPA de 8 collèges des Bouches-du-Rhône.
– Projection au collège Anatole France en présence d’autres collégiens, de familles et de partenaires.

Évaluation

Un projet s’inscrivant dans la durée

Au rythme de deux interventions par semaine, l’intervenante a su instaurer une relation de confiance avec les collégiens et un cadre propice à la mise en oeuvre d’un projet exigeant pédagogiquement et artistiquement.

Des élèves investis et motivés

L’outil vidéo a été un bon moyen d’accrocher les élèves à l’action. Ils se sont tous impliqués dans l’aventure, à différents niveaux selon les sessions, de l’écriture au tournage en passant par la mise en scène.

Des objectifs pédagogiques et artistiques atteints

« Moi, collégien, ce héros » a été un très bon support pour développer les apprentissages scolaires (lecture, écriture, expression orale, etc.), les compétences psychosociales, le sens critique et l’ouverture culturelle de
ces jeunes. Ils sont entièrement parvenus à s’approprier l’oeuvre mythologique d’Homère en étudiant les textes et en les croisant avec leur propre vécu. En outre, ils ont su convoquer leur singularité, leur créativité et leur imaginaire, au profit d’une finalité artistique collective.

Une production collective représentative du travail mené par les collégiens

« Moi, collégien, ce héros » est le fruit d’un travail collectif, ayant conduit les élèves à coopérer, échanger et s’écouter pour aboutir à la production finale. Lectures, écritures et réalisations plastiques sont venues alimenter le travail cinématographique, ainsi que le montre le film documentaire réalisé et le livret de textes l’accompagnant, illustrant la richesse de ce projet multiforme.

La restitution et valorisation

Lors de la restitution au collège Anatole France, les élèves de la classe relais ont présenté leur film avec beaucoup de fierté à un public composé
d’autres élèves du collège, de l’administration, de certaines familles et d’institutionnels. L’occasion de se sentir écoutés, valorisés et de donner une
autre image de la classe relais.

« Moi, collégien, ce héros » a été un véritable espace d’expression, pour restaurer l’estime de soi de ces élèves en risque de marginalisation scolaire
et sociale.

Paroles de l’intervenante

«Les classes relais sont constituées de 7 à 10 élèves de 6ème et 5ème venant de collèges différents. La difficulté de mener un projet artistique dans ce
cadre précis est la durée des sessions. Chaque groupe participe à l’expérience pendant 7 semaines puis chaque élève retourne dans son collège. Ce temps est donc très court pour parvenir à instaurer une relation de confiance et impliquer chaque élève. Je suis intervenue régulièrement, deux fois
par semaine et ce projet artistique faisait partie intégrante de la pédagogie menée par l’enseignante.

Laure Prieur a mis l’étude de la mythologie au centre de son travail avec les élèves, venant ainsi nourrir ma démarche cinématographique : atelier
d’écriture, mise en scène, prise en main des caméras, visionnage de films, proposition d’interprétation, et réappropriation des grands personnages
de la mythologie. L’idée principale était de croiser l’histoire et le destin des héros de la mythologie et les histoires personnelles et les combats de
nos élèves au quotidien.

Nous avons aussi abordé la figure du super-héros, toujours très présente dans l’imaginaire collectif des élèves.

Compte-tenu du temps plutôt restreint de travail avec les élèves (7 semaines maximum), il était impossible de faire participer chaque groupe de la
même manière. Certains se sont consacrés plus spécifiquement à l’écriture, d’autres à la mise en scène et au tournage. Mais chacun a pu filmer et
être filmé.

Parallèlement, avec l’accord des élèves et de l’enseignante, j’ai décidé de filmer des séquences de travail car il m’est rapidement apparu primordial
de montrer la réalité de cette classe « particulière », d’évoquer les difficultés rencontrées par ces jeunes au collège mais aussi l’énergie et la grande motivation de cette enseignante toute aussi particulière.

Nous avons mené ce projet en collaboration avec la documentaliste du collège, une enseignante en Arts Plastiques et une enseignante d’éducation
physique. Plusieurs ateliers ont été menés avec ces personnes : documentation, boxe, fabrication de masques que nous avons utilisés pour le
tournage, fabrication d’un livret illustré qui reprend l’histoire de Thésée (certains dessins sont intégrés au montage du film).

Nous avons aussi réalisé de nombreuses interviews (en équipe de tournage réduite pour plus d’intimité) où ces jeunes ont su livrer sincèrement
leurs difficultés en classe, en groupe, leurs ressentis et leurs appréhensions concernant le retour dans leur collège en classe de « général » et plus
largement concernant l’avenir.

Le temps de compréhension du projet et d’implication personnelle des élèves a été dans l’ensemble assez long et parfois compliqué mais il est clair
que chacun (à part deux ou trois éléments en « très » grande difficulté) a su y trouver sa place.

Les élèves ont produit de nombreux écrits de grande qualité qui constituent le livret accompagnant le DVD.

Ils ont été force de proposition concernant la mise en scène, la mise en « images » de certains textes, l’expression corporelle pour certains, la danse
et le jeu d’acteur.

Filmer, être filmé, se questionner et s’exprimer devant les autres et avec les autres est une expérience qui de manière certaine, a recréé le lien –
indéniablement rompu pour la plupart des élèves de classe relais – entre collège, adultes enseignants et ces jeunes adolescents.»

Paroles de l’enseignante

«Lorsque nous avons écrit le projet « Moi, collégien ce héros » avec Axelle Schatz en mai 2015, nous avions déjà l’expérience d’un travail avec un
groupe d’élèves en grande difficulté scolaire au sein d’une classe de 5° SEGPA. La réussite de ce premier projet et l’implication du groupe d’élèves
nous avaient permis d’envisager un projet audiovisuel mais, cette fois-ci dans un autre cadre institutionnel, celui de la classe relais.

Afin de mener à bien ce travail de lecture/écriture/vidéo à terme, et nous inspirant des travaux de Serge Boimare, nous avons utilisé des adaptations
de récits d’Homère et proposé des pistes d’écriture à partir de lecture de ces textes, des projections d’extraits de Péplum ainsi que des recherches
documentaires en relation avec la mythologie grecque.

Points positifs

L’utilisation de la vidéo a permis l’adhésion de la plupart des élèves, un équilibre entre ceux ne souhaitant pas apparaître et les autres a eu lieu à
chaque session.

Le sujet proposé, des adaptations de l’Iliade et de l’Odyssée ainsi que la découverte plus générale des héros grecs a suscité de l’intérêt chez ce
public et a permis leur adhésion aux projets de lecture et d’écriture ainsi qu’aux projets de réalisations plastiques.

La projection en fin d’année scolaire devant des classes du collège d’Anatole France, certains anciens élèves du dispositif et leur référents
pédagogiques a été une réussite, sujet de fierté pour les élèves relais et d’admiration chez les autres.

Points négatifs

Le fonctionnement même de la classe relais qui accueille un groupe d’élèves pour une période de deux mois, nous a contraint à envisager un travail
concentré sur six semaines environ. Cette contrainte de temps et l’absence de certains élèves à partir de la troisième semaine (réintroduction en
classe d’origine) a posé problème, principalement pour les séances de prises de vues ou d’enregistrement.

Les séances de montage que nous envisagions lors de l’écriture du projet n’ont pu être réalisées en raison des deux raisons évoquées ci dessus.
Les élèves se sont néanmoins familiarisés avec les techniques de prises de vue de base.

Parmi ce public d’élèves décrocheurs certains d’entre eux avaient des problématiques qui nécessitaient sans aucun doute une autre prise en charge
et un autre accompagnement que celui de la classe relais. Pour ces rares élèves, l’adhésion au projet n’a pas été effective.

Bilan général

Le choix d’une pédagogie de projet, pour ces élèves en rupture, à fin de resocialisation et réintégration dans le cycle scolaire, par le biais d’un
travail coopératif, avec confrontations, interactions pour une production collective a été productif. La classe relais du collège Anatole France avait un
taux de fréquentation d’environ 80%. Aucun des élèves reçus dans le dispositif a refusé de participer aux ateliers proposés dans le cadre de ce
projet. Malgré des exigences institutionnelles contraignantes (retour des élèves en classe d’origine répartis sur l’ensemble de la semaine dès la
troisième semaine), nous avons pu observer un intérêt chez la plupart des élèves.

Le projet que nous avons mené avec Axelle Schatz en classe relais au collège Anatole France a abouti à la réalisation d’un document montrant à la
fois la réalité scolaire douloureuse de ces élèves et leur capacité à analyser leurs difficultés en les mettant en relation avec les exigences du système
scolaire. Pour la plupart, ce projet leur a permis de restaurer une image de soi positive en montrant un travail dont ils pouvaient tirer fierté.
Lors de la projection, le collège et certains partenaires éducatifs ont pu se rendre compte de la qualité du travail réalisé par ces élèves en rupture
grâce à une approche pédagogique différente et l’ouverture sur une autre manière d’apprendre et nous l’espérons, se rendre compte du quotidien
difficile de ces adolescents.»