LA SUBTILE MEMOIRE DES HUMAINS DU RIVAGE – A FAIRE BASCULER DANS ACTIONS

Avec les outils du cinéma léger (caméra 16 mm Bell-Howell et A-Minima, enregistreur Nagra), ces ateliers amènent les habitants des quartiers de Marseille à se projeter au travers d’un geste cinématographique très proche de l’instant vécu, qui consiste à voir, entendre et faire le cinéma qu’on a dans les mains, plus que dans la tête… Peut-être un cinéma sans regard !

Film flamme

Les deux cinéastes qui, en 1997, avaient initié un atelier de cinéma avec des habitants du quartier du Panier, centre historique de Marseille, ne savaient pas, alors, qu’ils venaient d’entreprendre une démarche unique, un projet au long cours, qu’ils nomment aujourd’hui :
La subtile mémoire des humains du rivage

A l’oeuvre, en tout cas, la volonté de ne jamais associer le cinéma avec le labeur, ou donc la rapidité de fabrication est déterminante qui donne aux films cette légèreté qui séduit les publics malgré la forme inhabituelle de ce “cinéma de quartier”. Loin des valeurs conventionnelles.

Territoire habité depuis fort longtemps, Marseille fête les 2600 ans de l’arrivée de marins grecs à l’origine de sa fondation.

“Mais, 27 000 ans plus tôt, sur ce même territoire, des hommes représentaient leurs mains, sur les parois d’une grotte où ils habitaient, à la façon d’un pochoir, par projection de peinture”.

Les grottes d’aujourd’hui sont devenus nos quartiers, et nous reproduisons le même geste qu’il y a 27 000 années, et nous appelons ça du cinéma. Dans cette ville, des hommes que les siècles séparent, accomplissent le même geste de se projeter sur leurs murs, de s’affirmer présents et souverains.

L’art cinématographique est né au cœur de l’industrie avec laquelle il entretient un rapport toujours conflictuel. L’industrie se replie toujours dans le conformisme et la répétition des formes, érigées en absolu, en achèvement. Nous lui opposons un cinéma vivant, inspiré du “cinéma des origines”, une renaissance, un perpétuel renouvellement des formes. Un cinéma à hauteur de l’homme. Un cinéma langage.

Nous recherchons dans cette origine ce qui est pertinent, ce qui nous importe, ce qui en exprime le premier désir de cinéma. Il n’y a pas ici de nouveauté, juste un peu de technique en plus. L’oeuvre qui s’accomplit est issue d’un geste presque immédiat (et très personnel, grâce à la petite taille de la caméra Bell Howell, ou A-Minima demain) et se tourne en quelques heures au sein du quartier sans autre projet (sans scénario) que d’être là, présent à cet instant… Et regarder.

Le son, enregistré séparément (c’est à dire sur en enregistreur professionnel de type Nagra) peut l’être parfois sans autre lien que d’être enregistré le même jour, sans chercher absolument une cohérence, une correspondance ou une synchronisation. Et sans plus de projet qu’écouter.

Le son est monté (sur table de montage film et station de montage X-Track, audio numérique, couplée) sur l’image qui reste “brut de tournage”, à la recherche d’un sens, ou simplement de “quelque chose”, nous disons : “les petits miracles”. La narration est déterminée par la matière qui a été enregistrée. Nous ne disons pas que les films sont “tournés-montés” car cette idée implique la préexistence d’une idée du montage lors du tournage. Le montage est aussi une découverte de l’instant ou on “rapporte” les sons aux images à la recherche de ce qui peut les lier.

Les narrations rassemblées sont d’abord subjectives et racontent le présent inoué d’un territoire habité. Ce sont des témoins et non des témoignages.

Oeuvre collective et anonyme, “La subtile mémoire des humains du rivage” s’enrichit au fur et à mesure des réalisations; elle regroupe à ce jour cinq séries de films: Paniercinejournal, Cinepantomime, Cinelumiére, Cinemusical, Cinejoliette.

L’association attache une grande importance à la diffusion des films dans le cadre de projections en festival en France et à l’étranger. Les habitants sont alors invités à présenter leurs films au public.